n° 28 - 20 septembre 2014


Loi de Santé : la médecine générale mal traitée

C’est dans la tourmente que se révèlent les grands hommes d’Etat ! Jeanne d’Arc, De Gaulle ou Gambetta ont su, dans des périodes dramatiques, réveiller l’Esprit de la Nation pour prendre les grandes décisions, afin de construire la France. De ce point de vue et concernant la Loi de Santé, on peut être tranquille. Nous ne devons pas être dans une période où il est important d’agir de manière intelligente et courageuse. Ce « petit texte » de Loi ne répond en rien à la commande du chef de l’Etat et aux demandes formulées par la Stratégie Nationale de Santé pour moderniser notre système de soins. MG France a fait 9 propositions précises. Mais, dans la loi de Santé, il se trouve qu’il n’y a :

- rien sur la reconnaissance des soins primaires, mais au contraire leur assujettissement aux ARS et à l’hôpital

- rien sur les moyens à donner aux équipes de soins

- rien sur le développement de la formation continue des professionnels

- rien sur le renforcement de la logique du médecin traitant ; au contraire, nos tâches sont fractionnées et distribuées à tous types d’acteurs

- des doutes sérieux sur la mise en place effective du Médecin Traitant de l’Enfant : qu’en est-il de la santé des plus jeunes, de la prévention, quand la défense des intérêts partisans prime sur l’intérêt de tous ?

- rien sur la formation initiale des professionnels du soin primaire

- rien pour favoriser l’installation libérale

- rien concernant un volet conventionnel spécifique dont les professionnels auraient besoin

- rien sur les réformes institutionnelles pour que les médecins disposent d’outils collectifs pertinents et efficaces

- rien sur les investissements à réaliser dans les soins primaires. Rien, ou si peu…

Le médecin généraliste est dans les soins primaires, le spécialiste de l’approche globale de la personne et de son entourage. Nous intervenons dans la durée. Professionnels de haut niveau, ayant fait 8 à 9 ans d’études, dans cette loi, aucune de nos spécificités n’est reconnues, aucun des outils dont nous avons besoin pour remplir nos missions ne nous sont accordés. Quelle déception, quel gâchis !

 

Bernard Plédran

Politique de Santé


--------------- Indemnités journalières :

Le harcèlement des caisses sur les indemnités se poursuit et MG France reste tout particulièrement mobilisé sur ce sujet. Au-delà du constat sur la stupidité du délit statistique, les thérapeutes que nous sommes se doivent d’analyser, de quantifier le symptôme.

On nous dit que les médecins en général prescrivent plus d’arrêts par rapport à 2013.

Rappelons qu’en 2013, ils en prescrivaient moins qu’en 2012… Et partant de là, quel est le niveau « normal » d’arrêts ? Celui de 2012, de 2013 ou de 2015 ?

Quelles sont les causes de ces variations ? Conjoncturelles certes, mais économiques, en rapport avec des épidémies, ou plus spécifiquement, avec le prescripteur ?


avant de menacer, comprendre ------

Si oui, où sont les études qui nous donnent un référentiel à partir duquel réfléchir à des solutions acceptables, autres que les sanctions aveugles? Quels sont les facteurs pouvant expliquer la prescription d’arrêts de travail et pondérant leur durée ?

Quel est le poids respectif des lombalgies, de la grippe, de la dépression, de la souffrance au travail dans la masse des arrêts ? Au niveau individuel, quelle est la variabilité naturelle, pour un médecin, de son volume d’arrêts ?

L’importance du problème devrait nous dispenser de l’amateurisme du délit statistique et induire une réflexion en accord avec les médecins pour diminuer le risque de désinsertion des patients en particulier en cas d’arrêt long.

 

Jean-Christophe Calmes

Profession


--Coordination interprofessionnelle :

Que de sigles dans l’interpro ! ACI, ACIP, ENMR, ASALEE, PAERPA(*)… Comment comprendre le travail en équipe présenté par ces sigles ?

Depuis la loi « Hôpital Patients Santé Territoires » de 2009, la coordination autour du patient, la synthèse, l’éducation à la santé font partie des missions du médecin généraliste (art L4130-1). Ces dernières sont mises en œuvre, notamment par des protocoles pluri-professionnels, avec des professionnels soignants, dans l’intérêt des patients.

A l’heure des négociations interpro, faisons simple : un travail en équipe, sans sigles compliqués et sans nouvelles tracasseries administratives ! Un travail basé sur notre dossier patient habituel ! Le travail commun doit surtout permettre les échanges entre professionnels autour d’un patient (ce que nous faisons déjà !), avec une rémunération équitable et perçue simplement, sans nécessité de pointage.

 

 


faisons simple ! ----------------------------

Pour exemple, l’expérience Asalée (4), lancée en 2004 en Poitou-Charentes, désormais étendue à toutes les régions, est un protocole de coopération entre infirmière et médecin, intégrant un versant d’éducation thérapeutique du patient, mais aussi le dépistage de la BPCO (chez les fumeurs) ou encore une dimension de santé publique (repérage des patients ciblés par les campagnes de dépistage). Le médecin utilise son logiciel métier, comme d’habitude. L’infirmièr(e) est salarié(e) de l’association Asalée, et non du médecin. Les temps de coordination sont rémunérés. Chacun (du patient aux soignants) apporte ses compétences, sans lien hiérarchique, sans travail administratif supplémentaire pour le médecin. Simplement dans l’intérêt des patients, avec un coût moindre pour la société du fait du moindre recours à l’hôpital par les patients. Faire simple, c’est possible!

 Teddy Bourdet

* ACI : Accord cadre Interprofessionnel ; ACIP Accord Conventionnel Interprofessionnel ; ENMR : Expérimentation sur les Nouveaux Modes de Rémunération ; ASALEE : Action de SAnté Libérale En Equipe ; PAERPA : Personnes âgées en risque de perte d’autonomie

 

Métier


Liberté, Égalité, Contrariétés…

La liberté d’installation fait débat depuis des années. Et c’est surtout, voire exclusivement, de médecine générale dont il est question. Il y aurait des déserts médicaux, des zones géographiques où les médecins généralistes ne viennent plus « visser leur plaque ».

Il faudrait donc les y contraindre. De quoi s’agit-il au juste ?

Le monde politique a pris le débat en mains sous l’impulsion de l’association des maires de France et du Conseil de l’Ordre des Médecins (Propositions de 2008). Les gouvernements sont prudemment restés sur une attitude incitative, mais avec des mesurettes dont le peu d’ampleur contenait déjà en germe les maigres résultats ultérieurs (les 200 praticiens territoriaux de Mme Marisol Touraine par exemple). 

Les élus locaux, spécialement ceux des territoires « désertés », prônent pour leur part la coercition pure et simple à l’installation (rapport sénatorial 2012).

Les syndicats de médecins, « vent debout » contre la coercition, demandent des mesures d’incitation fortes et généralisées, une revalorisation suffisante du métier de médecin généraliste pour qu’il redevienne attractif, voire tout simplement vivable.

Revenons sur les faits :

- on nous oppose que l’État prend à sa charge nos études, ce qui constituerait une dette que nous devrions payer par une installation contrainte. Nous avons tous été « externes », payés quelques sous pour cinq heures par jour de travail à l’hôpital, plus les gardes,théoriquement de l’enseignement pratique,

 


mais en fait secrétariat, brancardage etc. Rémunérés quelques sous et pas 60 % du SMIC ! Cet argument ne tient pas.

- on nous oppose les missions régaliennes de l’État, qui doit assurer à chaque citoyen un égal accès aux soins et donc imposer la présence de médecins partout. On nous parle aussi d’un héliotropisme qui pousserait les médecins à s’installer au bord de la méditerranée…

 

Tous nous avons réfléchi où « visser notre plaque ».

Et qu’avons-nous recherché ? Le soleil ? Chercherait-on des généralistes en Midi-Pyrénées ? La latitude ? Y aurait-il une meilleure densité de MG en Nord-Pas de Calais que dans le Centre ?

En général, les médecins généralistes, comme les autres, acceptent un certain degré de mobilité ou de contraintes. Ils réclament aussi des infrastructures de qualité de vie (routes, écoles, internet et commerces à la campagne, sécurité dans les zones périurbaines où même les policiers hésitent à aller). Il est de la responsabilité de l’État d’aménager le territoire.

Mais surtout, de plus en plus, les généralistes raisonnent en termes de parcours de soins, car les prises en charge changent. Comment s’étonner qu’ils rechignent à s’installer là où il n’y a plus de spécialistes ni d’hôpitaux ? Plus on concentre les spécialistes et les plateaux techniques dans les grands pôles urbains, plus on dévitalise le réseau des soins primaires à distances de ces pôles. Il est bien de la responsabilité du ministère de la Santé d’aménager les parcours de soins partout.

 

 

Jean-Christophe Nogrette

 

 

 

Pratique


Accessibilité : MG France exige un délai !

La loi accessibilité des cabinets médicaux, qui devait s’appliquer au 1er janvier 2015, va être l’objet, par ordonnances gouvernementales, de précisions complémentaires relatives aux modalités d’application. Ces ordonnances doivent paraître au plus tard le 11 décembre 2014. Il est donc matériellement impossible que les 120 000 médecins libéraux puissent faire toutes les démarches en à peine un mois.

Les médecins ne vont pas non plus faire évaluer l’accessibilité de leurs cabinets ou commencer les travaux, puisqu’il est prévu que les règles d’accessibilité soient « simplifiées ».

C’est pourquoi MG France demande, dès à présent, un report des dates butoir, afin de pouvoir s’organiser de façon sereine. Ceci dans l’intérêt des populations, car une application trop stricte des délais risque de provoquer des impossibilités d’exercer et donc un accès réduit aux soins.

Ce dossier, qui n’a pas été géré en concertation avec les professionnels de santé va devoir désormais être traité avec intelligence et discernement. Car même de nombreuses administrations ne peuvent actuellement faire face aux obligations de la loi.

Les médecins ne doivent devenir des boucs émissaires ni être les seuls dindons de la farce.

 

Gilles Perrin

 

 Site du jour

Smarfiches : une encyclopédie au service des professionnels de santé et des étudiants en médecine. Réalisé par un interne du CHU de Nîmes qui voulait aider ses collègues à

réviser l'internat. Une fois inscrit, on accède à toutes les ressources. Des versions pour Smartphones existent aussi


Contrôles des prescriptions IJ : ne restez pas seul !

La CNAM  fourni les données chiffrées de prescription d'arrêts de travail des médecins et les caisses départementales adressent des courriers à de très nombreux médecins dont les chiffres dépassent la moyenne. Les CPAM passent sans aucun état d'âme d’une  analyse de situation à une sanction !

Refusez la mise sous objectif qui demande aux médecins de rectifier le tir et de rentrer dans le statistiquement correct sans aucune référence aux soins, et à la santé des patients !

Si vous êtes confrontés à ce genre de procédure, contactez votre représentant local de Mg France.

 

Agenda

Etes-vous bien spécialiste en médecine générale ?

Attention : le 1er octobre est la date limite pour demander sa qualification de "spécialiste en médecine générale" de manière rapide et gratuite.

Au delà de cette date, il vous faudra passer par une procédure nationale (à Paris) et surtout payer 200 euros.

Payer pour obtenir ce droit - alors que les jeunes médecins seront directement qualifiés spécialistes) serait un brimade de plus sur la route de la reconnaissance de notre belle spécialité !   

 

 

Chiffre du jour

207,5 euros bruts mensuels pour 4 demi journées. C’est le prix que devront payer les ARS aux PH volontaires pour voler au secours des zones fragiles. Soit un peu moins de 50 euros nets la demi-journée. A ce prix là, c’est sur, il va y avoir foule !!!



N'hésitez pas à adhérer à MG France,
le seul syndicat des médecins généralistes